Mon journal du confinement
Vendredi 13 mars 2020,
Journée vraiment particulière au lycée. On a appris la veille au soir que le confinement entrait en vigueur au début de la semaine prochaine, que les écoles, collèges, lycées, universités allaient fermer dès lundi. Notre cher ministre avait pourtant déclaré environ 3h plus tôt que la fermeture des établissements scolaires n’était absolument pas envisagée… Bon j’avais bien remarqué qu’il ne savait jamais de quoi il parlait, voilà c’est confirmé !
Un cours avec les terminales de 9h à 10h, les questions fusent, je leur dis que je ne sais pas grand-chose, qu’il est urgent d’attendre et qu’une réunion des personnels à la récré de 10h nous en apprendra davantage. En attendant je me dépêche de finir le chapitre en cours, on pourra ainsi faire des exercices type Bac sur les probabilités conditionnelles. (Sachant que la réunion est prévue de 9h50 à 10h15, quelle est la probabilité que le cours suivant commence avant 10h30 ?)
Notre chef d’établissement nous parle de continuité pédagogique, de maintenir le contact avec les familles et les élèves, que les professeurs seront amenés à venir au lycée pour les conseils de classes et éventuellement s’occuper des enfants de soignants et que pour commencer on ferait une AG lundi à 9h… pour décider… de comment on va faire quoi.
La séance est houleuse, on sent la nervosité chez certains, entre maladresses et incompréhension, une collègue sort en claquant la porte.
Je reprends mes cours à 14h, ça me laisse le temps de réfléchir à la façon dont je vais optimiser mes dernières heures avec mes classes, faire des photocopies à distribuer aux secondes, des fiches d’exercices sur les vecteurs, ils auront toujours de quoi s’occuper au début, car je doute que l’ENT (Espace Numérique de Travail) tienne le choc, on sait bien que quand tous les profs sont dessus en train de rentrer les appréciations pour les conseils, il tombe en rade… L’idée de passer l’après-midi avec les élèves surexcités me fait monter une vieille angoisse, déjà que le vendredi de 15h à 17h avec les 2nde 4 c’est une épreuve, alors là… Faudra leur dire de passer à leurs casiers récupérer tous leurs bouquins avant de rentrer chez eux.
Faut avouer que ne plus voir les élèves pendant plusieurs semaines me rend très joyeuse moi aussi !
Samedi 14 mars
Dans ma boîte mail, une publicité pour une plateforme d’exercices en ligne me propose un essai gratuit pendant un mois. Oh ben, ça tombe très bien, j’explore la base d’exercices, il y en a pour tous les niveaux, même pour les séries technologiques, j’ai l’impression de tomber sur une mine d’or ! !
Je récupère les fichiers excel avec mes listes d’élèves et j’inscris mes quatre classes. Le lendemain je reçois tous les identifiants, je n’ai plus qu’à envoyer 100 mails pour les communiquer aux gamins. Cette plateforme s’appelle KWYK, et c’est vraiment super bien conçu, un gain de temps énorme, quelques minutes pour choisir des exercices, régler le nombre de tentatives possibles, (je choisis « illimité », comme ça il n’y a pas de pression, pas de stress, « bienveillance » absolue !) mettre une date butoir, et hop !
À tout instant, je peux me connecter, et de ma console je vois pour chaque classe ce que fait chaque élève, combien de fois il a essayé, et sa note temporaire sur 20. En grande majorité des élèves adhère, et sans même s’en rendre compte ils automatisent des méthodes… En fin de devoir je reçois par mail un bilan par classe. Mais si seulement on pouvait avoir ce genre d’outils en temps normal, quelle aide précieuse ! (Il existe des sites gratuits un peu similaires, mais beaucoup moins ergonomiques, dommage que l’Éducation Nationale fonctionne toujours à moindre coût, son objectif principal étant à chaque réforme de toujours faire plus d’économies.)
J’en parle à mes collègues, mais malheureusement, la plateforme est victime de son succès et doit suspendre ses inscriptions gratuites.
Dimanche 15 mars
Mon fils (24 ans) m’appelle, c’est l’angoisse, il ne se voit pas rester dans son appartement à Grenoble, il veut rentrer. On se met d’accord, il range l’appartement, prépare ses affaires, il prendra un train demain. Son père le récupèrera et le prendra chez lui.
Une heure plus tard, ma fille (22 ans, étudiante en licence de Design à Cognac) me téléphone : « Maman je ne vais pas rester toute seule si loin de vous, faut que je rentre, mais avant je dois déménager mon appart, faire le ménage, l’état des lieux, ça va me prendre la journée de lundi, je prendrai la route mardi avec tout mon barda ! Et en plus ma logeuse à Rennes pour mon stage me réclame la caution, elle dit qu’elle a beaucoup de demandes de réservations ! »
C’est ça, elle doit plutôt crouler sous les annulations oui, c’est honteux de vouloir profiter de cette situation. OK, je vais me charger de l’appeler…
On se renseigne auprès de la gendarmerie, qui nous dit qu’il vaut mieux qu’elle rentre dès que possible, il est probable que mardi midi tout soit bloqué…
Lundi 16 mars
Bon, la réunion est annulée, en même temps on se demandait bien ce qu’on allait y faire, on n’a pas d’info… Mais les conseils de classe, alors, on y va ou pas ? J’en ai deux ce soir, pour mes deux terminales. Tiens, je vais quand même rallumer mon téléphone, il est 15h ! Ah oui la Cheffe a essayé de me joindre, ma co-professeure principale aussi…. Elle voulait faire le conseil avec Whatsapp à 15h dis donc, j’ai eu du nez ! Ah non, en fait elle veut faire une pause, elle est sur le pont depuis 7h ce matin, elle a faim et n’a même pas eu le temps d’aller faire pipi ! !
Elle a aussi créé un groupe Whatsapp, avec tous les personnels. Déjà 35 collègues ont répondu : « Bien reçu », ou « ça fonctionne ! »
16h, le conseil commence, à trois, et ça dure longtemps, longtemps, (formulation d’une appréciation pour chaque type de vœux sur ParcourSup). Soudain je perds la connexion, et quand je me reconnecte j’oublie de couper la caméra, Méghane est morte de rire en me voyant me prendre la tête dans les mains… oups ! 1h45 plus tard, c’est fini, j’ai envie de hurler, je sors courir dans mon jardin.
Ma fille prend la route à 18h30, avec sa petite 205 remplie jusqu’à la gueule, roule de nuit, se tape du brouillard à Saint Étienne, croise un méga accident dans lequel elle voit un corps auquel il manque la tête, et arrive épuisée à 2h30 du matin, je m’endors enfin.
Mardi 17 mars,
9h25 : 66 messages sur le groupe Whatsapp des profs du lycée, c’est la folie. L’ENT est planté, quelle surprise… Chacun y va de son idée pour joindre les élèves : récupérer leurs adresses mail, leurs téléphones perso… Les jeunes semblent aussi très demandeurs, ils nous invitent sur leurs réseaux, très organisés ! Discord c’est quoi ce drôle de nom ? Une plateforme de gameurs, (jeux en ligne).
Je me sens perdue, je n’ai aucune envie de passer des heures à récupérer leurs mails, ni de les rejoindre sur whatsapp (mon numéro perso ?) ni de me disperser sur plusieurs groupes, encore moins sur des trucs qui n’ont pas l’air de respecter la RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données). Je ne comprends pas l’urgence de faire travailler les élèves dans toutes les matières, s’ils restent 3 jours sans cours ils ne vont pas rater grand-chose, ils doivent être dans d’autres préoccupations, familiales, organiser la vie en confinement, trouver des ordinateurs à partager, prendre des décisions sur le lieu de confinement des autres membres de la famille, car à partir de midi la circulation des personnes sera interdite.
Partagée entre des émotions et sentiments divers : stressée par le bouleversement de mon quotidien, en colère contre notre ministre qui assure que nous sommes prêts, formés, opérationnels. Quelle arnaque ! (Le mois dernier les professeurs volontaires ont suivi une formation d’une journée sur Moodle, une plateforme numérique de création de cours complets. 3 jours plus tard, j’essaie de créer un nouveau cours, je n’y arrive pas, pas intuitif pour deux sous ce truc !) J’ai aussi mauvaise conscience de ne pas chercher à tout prix des outils pour travailler sans ENT. Et l’impression d’avancer dans le brouillard complet, personne ne nous dit ce qu’on doit faire.
Vendredi 20 mars
75 messages sur le groupe Whatsapp des profs, oula, ça sent l’hystérie ! Je coupe le son de mon téléphone, trop stressant !
Mes élèves commencent à me renvoyer des devoirs, par mail, sur l’ENT quand il daigne fonctionner, sur mon mail académique sinon… Et là, commencent les difficultés. Tous les jours, sur mes deux boites mail, des pièces jointes, jusqu’à 7 par messages, en plusieurs envois quand c’est trop lourd, parfois 6 messages avec une pièce jointe chacun, et que dire des formats : pdf, jpeg, word, odt, et j’en passe… Mon ordi à la pomme ne semble pas pouvoir tout traduire…
Il faut s’organiser, j’en ai partout ! Je crée un dossier dans lequel je rassemble tout ça par classe. Ben oui, une centaine d’élèves qui ne pensent pas à mettre leur nom et classe, je dois donc renommer chaque pièce jointe, après l’avoir ouverte. Zut, il manque la page 3, je dois la réclamer. Tiens, ça ressemble à un devoir de SVT, ça parle de cadavre à température ambiante (hmm, exquis !), il s’est trompé, je lui écris pour le lui dire ! Et cela pendant environ une semaine, le temps que chacun prenne connaissance des outils et s’adapte aux connexions capricieuses. Résultat : 6 heures pour récupérer les 17 devoirs sur mon groupe de 23 Premières Spécialité Maths, venant des 5 premières générales (5 profs principaux à contacter pour prendre des nouvelles ou en donner…).
Ben maintenant il va falloir les corriger ! Mon imprimante ayant trouvé malin de n’imprimer qu’une bande verticale sur deux, et tant mieux, ce sera plus écologique, comment on fait pour corriger de façon numérique ? Un logiciel dédié ? Celui qui a été utilisé pour corriger les E3C1, ben non, nos inspecteurs ne nous proposent rien du tout, nous inondant de messages appelant à la bienveillance et nous parlent de maintenir le lien, bref aucune aide de ce côté-là… et de toutes façons ce logiciel ne marche pas avec tous les formats. Quel casse-tête, des heures sur l’écran, j’en ai les yeux carrés ! J’ai fini par trouver, j’ouvre les Jpeg et les pdf avec « Aperçu », les autres je dois les enregistrer en pdf avant de les ouvrir.
Toutes les 2 heures je sors me défouler dans mon jardin, heureusement il fait beau, c’est le printemps !
Lundi 23 mars
Je me décide à utiliser mon bureau pour travailler, ce que je n’avais jamais fait, depuis 10 ans que j’habite cette maison, mon coin cuisine ouverte avec cet immense plan de travail était bien plus agréable. Mais là il faut que je trouve le moyen de séparer un peu le « personnel » du « professionnel ».
Je commence par enlever les notifications de mails pro qui arrivaient sur ma boîte mail perso, ça va me soulager, mais je préviens mes deux collègues matheux avec qui je travaille que je ne vais pas regarder toutes les 5 minutes mes mails, et qu’ils m’envoient un texto s’ils veulent une réponse rapide.
J’essaie d’utiliser certains outils de l’ENT.
Le « travail à faire avec remise en ligne », utilisé une ou deux fois depuis la rentrée, ça devrait pouvoir m’aider. Je donne un petit exercice à faire à mes deux classes de terminale, avec comme consigne de le faire dans leur cahier, de le prendre en photo et de déposer en ligne. Dans une classe, seuls 5 élèves réussissent la manip, les autres m’envoient leur travail par mail… dans l’autre classe, aucun n’y réussit… Il semble que je n’aie pas fait ce qu’il fallait, il faut dire que ce truc-là n’est pas très intuitif…
Allez, j’ai une super idée : dans l’espace classe, je crée un dossier partagé dans lequel je leur demande de déposer le travail. Pas mal, un certain nombre font comme cela. Plutôt satisfaite de moi. Pas pour longtemps ! Une élève m’écrit un mail pour me dire qu’elle refuse de déposer son travail dans ce dossier, car tous ses camarades peuvent le voir et lui copier dessus ! Crise de nerfs qui monte, qui monte…. Le canapé et ses gros coussins en font les frais, je tape je pleure je crie. Et je ris en même temps car je me rends compte que ma fille filme la scène. Je réalise que je dois absolument trouver des moyens pour préserver ma santé psychique, je me sens bien fragile…
Mardi 24 Mars
Question du jour : « Comment fait-on pour créer un dossier partagé pour un regroupement d’élèves provenant de plusieurs classes ? ». Ah ah, bonne question, au bout d’une heure de galère, je sens que je m’énerve, je vais jouer ma carte « appel à un ami ». Ah, ben oui, j’aurais pas pu le deviner, l’architecture de l’ENT est complexe, pour ne pas dire confuse.
Mercredi 25 mars
Les propos de Sibeth Ndiaye ne passent pas. La porte-parole du gouvernement a perdu une belle occasion de se taire. Pour revenir sur l’appel à ceux qui ne travaillent plus à aller aider les agriculteurs. « Nous n’entendons pas demander à un enseignant qui aujourd’hui ne travaille pas compte tenu de la fermeture des écoles de traverser toute la France pour aller récolter des fraises », expliquait-elle devant les caméras. Je manque m’en étrangler de fureur ! Vraiment ils se moquent de nous ! Quelle incompétence, quel mépris !
Moi qui d’habitude attends la pleine saison pour acheter des fruits, j’achèterai des fraises toutes les semaines.
Mercredi 1er Avril (Classe Virtuelle)
Depuis la semaine dernière, certains collègues se sont lancés et utilisent le site du CNED (Centre National d’Enseignement à Distance, pour ceux qui ne parlent pas le jargon de l’Éducation Nationale) pour animer des « Classes virtuelles ». Je suis un peu réticente, ne vois pas ce que ça peut apporter, et surtout je n’ai jamais fait ça, ça demande un certain investissement pour apprendre à maîtriser l’outil. J’imagine qu’il va falloir passer quelques heures à inscrire tous mes élèves… Je lutte contre ma mauvaise conscience, je me sens mauvaise prof…
J’ai fini par céder, hier j’ai demandé de l’aide à ma collègue d’Allemand qui a l’air très à l’aise avec tous ces bidules numériques. J’ai d’abord créé un compte sur le CNED qui m’a généré deux liens pour ma classe virtuelle, un lien modérateur pour moi, et un lien participant pour mes élèves. Puis j’ai envoyé ce dernier à ma collègue, et nous avons commencé une séance à deux. Les paramètres à régler, différents profils à attribuer, partage de l’audio, de la caméra, comment partager du contenu, (documents, tableau blanc, onglet…). En moins d’une heure, on a fait le tour des fonctionnalités de base. Merci Floriane d’avoir pris le temps, avec tes classes de collège et de lycée et surtout des enfants en bas âge pour qui il faut organiser son emploi du temps, bref je suis très impressionnée !
Ah d’accord, c’est le même lien pour toutes mes classes. Mon petit processeur interne imagine déjà tous les ennuis à venir : Les élèves peuvent venir tous en même temps, toutes classes confondues, et puisqu’ils ne sont pas inscrits par moi, ils peuvent se connecter avec n’importe quel pseudo, et même communiquer ce lien à n’importe qui d’autre…
Bon je me suis lancée. J’ai envoyé par mail le lien à mes élèves avec un créneau horaire pour chaque classe, mercredi après-midi ils n’auront pas d’autres cours prévus…
14h30, 4 élèves de seconde sont là, on partage la vidéo, ils me donnent de leurs nouvelles, je réponds aux questions pratiques, et je leur donne rendez-vous le lendemain en me calant sur leur emploi du temps habituel. Je suis surprise car c’est leur première classe virtuelle ! Moi qui pensais être la dernière à m’y mettre…
15h30, groupe de première spécialité mathématiques. 5 participants. On fait quelques exercices, lentement car l’écriture sur le tableau virtuel avec mon pad n’est pas aisée. Mais cela semble bien convenir, cela leur laisse le temps de poser des questions, ils sont indulgents avec moi. Une heure vite passée !
16h30, 6 élèves de terminale ST2S (Sciences et Technologie de la Santé et du Social). Eux ont déjà l’habitude de la classe virtuelle, ils sont calmes et disciplinés.
17h, 11 élèves de l’autre terminale, on échange un peu, ils sont un très angoissés par les problèmes de connexion, me disent que certains n’ont pas d’ordinateur et n’utilisent que leur téléphone sur lequel certaines fonctionnalités ne sont pas actives. Ils sont très solidaires et bien organisés, cela ne m’étonne pas d’eux, ces futurs soignants !
Bon, ben finalement j’ai réussi, contente de moi…
Jeudi 2 avril (Parcours du combattant et Parcoursup)
10h, premières, 5 élèves connectés, ils ont des questions sur le cours que je leur ai envoyé, et sur les exercices en ligne. Ils s’inquiètent de savoir si les classes virtuelles sont obligatoires, je leur dis que cela n’est que pour les aider, et que je comprends bien qu’ils ne peuvent pas tous être disponibles et qu’il peut y avoir des problèmes techniques parfois insurmontables.
11h, cette fois les secondes sont 24 sur 34, certains se connectent avec des pseudonymes peu orthodoxes, je leur donne les règles de base : se connecter avec son prénom et première lettre de leur nom de famille, pour que je puisse faire l’appel, et que je sache qui prend la parole. Demander la parole et attendre mon autorisation pour parler… je déconnecte les récalcitrants, qui reviennent aussitôt. Peine perdue, ils sont trop contents de se retrouver, racontent n’importe quoi sur le chat, c’est le chahut, je suis débordée. Je coupe le chat, leur micro et leur donne rendez-vous en demi-classe pour demain après-midi. OK, les terminales ont raison, pour que ça se passe bien il va falloir que je réfléchisse. Je suis dépitée…
16h, Terminales, 22 présents sur 24, me donnent des conseils pour mieux gérer : « ne mettez pas le micro pour les élèves, ça fait trop de bruit et ça donne mal à la tête si tout le monde parle en même temps, mettez plutôt le chat comme ça si d’autres se connectent entre temps, on se charge de leur dire où on en est. » Bon, super, merci, on va faire comme ça.
Le soir, préoccupée et passablement énervée par ce qui s’est passé avec les secondes, je leur envoie à eux ainsi qu’à leurs familles aussi un message sur l’ENT, en rappelant les règles à appliquer, et que je n’hésiterai pas à appeler les familles si de nouveaux manquements venaient à se produire.
Dans la soirée, ma collègue Co-Professeure Principale (nouveau depuis l’an dernier, un exemple de plus du principe d’impréparation maximum. Pour rappel, la notion de deuxième professeur principal pour les terminales, dans le cadre des cafouillages de Parcoursup, a été décrétée une semaine avant les conseils de classe du premier trimestre) m’appelle, elle est inquiète pour un élève qui n’a encore validé aucun vœu, et malgré ses nombreux mails envoyés depuis lundi à lui et à ses parents, ne donne aucune nouvelle. Bon, en espérant qu’il n’y ait pas de problème grave dans cette famille, on attend, je prends le relais et me connecte sur Parcoursup toutes les heures…
22h toujours rien, je fais une exception à mon grand principe de ne pas utiliser mon téléphone personnel pour contacter un élève, j’appelle à 22h30 et je tombe sur le répondeur. Bizarre, inquiétant… Je laisse un message.
23h15, la maman envoie un texto à ma collègue en remerciant de nous inquiéter, les lettres de motivation sont en cours de finalisation ! ! Heureusement que des ateliers sont mis en place dès le mois de janvier pour les accompagner dans cette tâche ! Pfiou ! Bon courage à la maman qui va veiller à ce que tout soit validé avant minuit !
Vendredi 3 Avril,
11h, Classe virtuelle avec les TST2S1. 14 présents (sur 25), certains préfèrent regarder l’allocution de notre ministre. On travaille bien, je commence à apprécier ce rendez-vous virtuel.
Bon, cette fois ça y est, il a obtenu ce qu’il voulait depuis longtemps, le Bac en contrôle continu ! Les notes des 3 trimestres sont prises en compte, excepté celles obtenues pendant le confinement…
Le groupe Whatsapp du lycée s’affole… « Quoi ? Depuis trois semaines on bosse comme des fous à récupérer et corriger des devoirs par tous les moyens, et les notes ne compteront pas ? Mais il ne pouvait pas le dire avant ? Et comment on fait pour faire tenir les élèves jusqu’au 4 juillet ? «
Bon, personnellement la leçon du devoir surveillé n°7 des premières transformé en devoir à la maison m’avait totalement découragée, et j’ai opté pour les devoirs KWYK dans toutes les autres classes, je vérifie juste s’il est fait, je donne la correction et je coche dans ma liste pour contrôler l’assiduité et pouvoir ainsi faire chaque semaine mon rapport aux professeurs principaux et au CPE (Conseiller Principal d’Éducation). Et puis il était un peu évident que pour des raisons d’inégalités flagrantes, ça nous pendait au nez !
Mais quand même, je comprends et partage la colère de mes collègues : depuis le début du confinement je me sens vraiment abandonnée par l’institution, nous n’avons pas de directives, nous travaillons seuls et sans moyens en utilisant notre matériel personnel, nos abonnements internet et téléphone, et je trouve ça vraiment difficile.
Aucune envie de faire ma classe virtuelle avec ces petits ingrats de secondes, je l’annule en prétextant une réunion visio avec mes cheffes.
Allez, plus que deux semaines et c’est les vacances !
SL